Témoignages

   

 

 Professeur Jean Baptiste OBAMA - Philosophe et Historien -

« Yaoundé a été créée le 30 novembre 1889 » Acteur prépondérant de l’histoire de Yaoundé, le Professeur OBAMA, philosophe et historien de renom retrace les origines de la cité capitale.

 

ONGOLA : Quelles sont les origines historiques de Yaoundé ?

Professeur Jean OBAMA : Yaoundé vient de ‘‘ONGOLA’’, qui signifie  la clôture ou l’enclos. Au temps d’ESSONO ELA, cette clôture empêchait les premiers allemands d’entrer dans la ville . OMBGA BISSOGO, un des premiers résistants à la pénétration allemande, disait à ESSONO ELA de ne plus donner du terrain aux Blancs. La capitale a été définitivement fondée le 30 novembre 1889 par l’équipe KURT morgen – Georges Zenker et un certain Mebenga Mebono, le future MARTIN Paul Samba qui était leur guide .

Le premier nom de Yaoundé était « EPSUM », c’est-à-dire «  chez ESSOMBA », ou encore « N’tsonun », « chez ESSONO ELA ».

 

ONGOLA : Mais d’où vient ce vocable Yaoundé ?

P. J .B. O: Déjà en 1887, une  première équipe allemande était passée avec à sa tête le capitaine Kunt et Tapenbech ; ce sont ces deux-là qui en allant au Sud Nachtigal depuis Grand Batanga et ayant aperçu des paysans qui  semaient des arachides dans cette endroit vallonné, leur ont demandé ce qu’ils étaient. Les planteurs ont répondu qu’ils  étaient des « Mia wondo » les allemands n’ayant rien compris ont transcrit comme ils ont pu et cela a donné Yaoundé. Yaoundé n’est donc qu’un barbarisme qui n’est aucune définition de « Yewondo », le vrai nom était « ONGOLA ».

 

ONGOLA : Quelles ont été les figures les plus marquantes de l’histoire de Yaoundé ?

P J B O: Je ne peux vous parler que de deux qui ont vécu à mon époque , c’est-à-dire à partir de 1925 car je suis né le 19 avril 1925 à Ngoa-Ekéllé. Le chef de ce quartier Joseph Atemengue et son beau père m’ont beaucoup marqué. La troisième figure marquante pour moi fut ONAMBELE MBAZOA, un Mvog-Ada qui avec  Joseph Atemengue furent les deux rescapés de la grande guerre à avoir occupé Yaoundé de 1916 à 1921 alors que Charles Atangana , chef supérieur des Bétis, était en fuite avec les allemands.

 

ONGOLA :Quel aura été le rôle des missionnaires ?

P J B O : On ne le dit pas assez, mais les premiers missionnaires ne sont pas ceux de Mvolyé, ce sont d’abord les missionnaires protestants de Djoungolo qui sont installés à Yaoundé ; ensuite Monseigneur Vieter et les Pères Pallottins arrivent de  Kribi en 1901 pour fonder Mvolyé qui veut dire « Mvola Ayé », c’est- à - dire «  les gens chez qui il est difficile d’emprunter ». Avec l’ordination des premiers prêtres noirs le 8 decembre1935 et la création des seminaires de Nlong, Mvolyé (Saint Laurent), Akono (Saint Joseph) par Monseigneur Vogt, les premières élites de Yaoundé vont commencer à émerger.

 

ONGOLA : Pourriez-vous nous parler des premières constructions de Yaoundé ?

P. J B O : Les constructions de Mvolyé datent de 1901 à 1907 , alors que le Palais de Charles Atangana d’Efoulan a été construit entre 1904 et 1910 mais le plus vieux bâtiment de la ville est situé derrière le Ministère des finances, à coté du petit cimetière allemand. Il a été construit par le Major Hans Dominik entre 1896 et 1899.

 

ONGOLA : D’où viennent les Ewondos ?

P J B O : les Ewondos ne sont qu’une sous branche de la grande tribu des Bétis ; les -  Bétis-be-Nanga -. Ils ont tous pour ancêtres nanga qui était albinos. Il sera appelé Nanga Akôn chez les Bulus. Béti a engendré des enfants dont kolo Béti , Etôn Béti, Mvelé Béti, (les Bassas) Mvân-Béti, Meka-Béti ( les Makas), Bulu la fille et Ntumu le dernier-né. Bulu était la seule fille de Béti-be-Nanga ; les Bulus ne sont donc pas les Bétis mais plutôt des « Ban Ngôn Béti ». Il n’y a que quatre petits groupes de vrais Ewondos : Les Mvog-Otoung-Mballa, les Mvog-Atangana-Mballa , les Mvog-Fouda-Mballa et les Mvog-Essomba-Ndana. Les Etenga parlent la même langue mais ne sont pas des Ewondos ; ils descendent des Tikars par le jeu des alliances de mariage et de sang pendant les guerres.

 

ONGOLA : quelle appréciation faites – vous du plan d’urbanisme de Yaoundé ?

P J B O : Tout part de la mode coloniale qui veut qu’un peu partout au Cameroun, les quartiers se créent par affinités tribales ( Quartiers Haoussa, Bamiléké…). Entant que capitale , Yaoundé n’a pas échappé au foisonnement des quartiers périphériques : Efoulan qui veut dire «  mélange des tribus » c’est à l’image de Yaoundé . A Nsimeyong il y avait les Bamouns car le sultan Njoya avait reçu cette contrée de Charles Atangana en 1931, c’est dire qu’une capitale est par définition cosmopolite.

Sur le plan précis de l’urbanisme , il y a une belle maquette  de Yaoundé qui a été conçue depuis le temps d’André Fouda et qui a été parachevée par Emah Basile. Elle prévoit une grande route périphérique tout autour de la ville. Tout y été prévu malheureusement, j’ai l’impression que son exécution tarde à se réaliser. Je trouve personnellement que l’immeuble de la mort est une admiration de la  désolation. On disait qu’il manquait d’architectes dans notre pays. Je souhaite que les espaces verts et les monuments soient aménagés sinon, comme le disait Monseigneur Jean Zoa  «  nous périrons avec notre ville au troisième millénaire ».

Propos recueillis par Mathieu MEYENE.

 

Interview de Monsieur Hubert MBARGA - Chef du quartier Awaë 2 - à Yaoundé

 Les  Origines du mot « ONGOLA »

‘Yaoundé’ est le nom officiel de la capitale politique du Cameroun. Cela est évident et par conséquent connu de tous. Toutefois, la grande majorité de Camerounais est incapable de donner la signification exacte du mot «Yaoundé ». Pour illuminer l’opinion publique, le journal « ONGOLA » a rencontré pour vous le Chef du quartier AWAE 2, Beaucoup plus connu sous le nom de : ETAM-BAFIA. Voici du moins la leçon d’histoire que ce patriarche a bien voulu nous donner.

« ONGOLA » : Bonjour Monsieur le chef de quartier, nous faisons partie de l’équipe du journal de la Cité  - Ongola -; et vous, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

 M.Mbarga Hubert : Je m’appelle Mbarga Hubert Emmanuel (MAYER pour les intimes). Je suis retraité après avoir loyalement servi mon pays de Décembre 1950 à Janvier 1987. Mon dernier poste fut celui de Chef de secrétariat du service éducatif. Je suis marié à trois femmes, père de 8   enfants ; 6 petits-fils et 4 arrière-petits-fils. Je suis né en 1929. Je suis Chef du quartier  AWAE 2 depuis 1974, ce qui m'a permis d’être médaillé - chevalier de l’ordre de la valeur ; Commandant de l’Ordre de la valeur -.

« ONGOLA » : D’où vient le nom « ONGOLA » ?

M.Mbarga Hubert : Mes chers enfants, je m’intéresse beaucoup à l’histoire et surtout à la généalogie « Beti ». De ce fait, je répondrai à cette question en vous disant que « ONGOLA » est un mot beti qui signifie  en français ‘barrière’ ou encore ‘clôture’. En effet, il y avait jadis un éléphant qui venait dévaster les champs vivriers près de l’endroit où se situe la poste centrale de Yaoundé. Pour protéger ses vivres, le propriétaire des lieux avait donc eu l’idée de faire une clôture tout autour de son champs. Vous voyez alors que pour se rendre sur les lieux, on l’avait ainsi baptisé " l’endroit où il y a la barrière ". En beti, on disait donc: je vais là où il y a l’« ONGOLA »(clôture).  « ONGOLA » devint donc un repère !!. Voilà la première approche des faits.

 La seconde version de l’appellation « ONGOLA » vient du fait de la mort d’un Allemand au pays. Il fut inhumé près de l’actuel Ministère de l’Économie et des Finances. La tombe du colon blanc était protégée par une clôture . Vous voyez donc que dans l’une et l’autre version, il y a l’idée de clôture, de barrière que les  « Ewondô » appellent « ONGOLA » ou «  ONGOLA EWONDO » qui signifie alors  "clôture de la tribu éwondô".

« ONGOLA » : Comment le mot « ONGOLA » est donc devenu  Yaoundé ?

 M.Mbarga : Vous savez qu’on était au temps des Allemands et, de plus, d’autres tribus étaient installées sur le site. La prononciation de ces étrangers a ainsi modifié le nom local en  « Ongola Ewondo » puis « YAOUNDE »  tout court. (Yaoundé étant la mauvaise prononciation de - Ewondo - par les colons).

« ONGOLA » : Vos explications illuminent nos lecteurs. Pouvez-vous, en plus nous brosser l’histoire du quartier dont vous êtes sur les commandes ?

M.Mbarga : Officiellement, mon quartier s’appelle AWAE 2 . Mais bon nombre de citadins préfèrent appeler  « ETAM-BAFIA » !!. En effet, L’appellation Awae 2 remonte à l’époque du Chef AYISSI Joseph, un descendant de la tribu Edjoa (l’ancien Chef de Groupement) Les administrés du Chef Ayissi, qui étaient également ses beaux-frères(puisqu’il avait épousé la fille de M.MEBE, un Mvog-Atangana Mballa), lui ont attribué un terrain où il a construit une maison de repos. La dite maison était lotie là où est bâtie la chapelle de Mvog-Mbi. Pour un beti,  le repos’ signifie : « Awae ». Le quartier hérita donc du nom « AWAE » qui veut dire ‘repos. Mon quartier est habité par les Bene ; les Manguissa ; les tsinga ; les Etenga , les ewondô et les autres halogènes. Les quartiers limitrophes d’AWAE 2 sont :

-         Au Nord, Nkolndongo 4 et 5

-         A l’Est, Nkolndongo 7

-         Au  Sud, AWAE 3 et 4

« ONGOLA » : Nous vous remercions sincèrement pour votre disponibilité

 

Précédente                    Propos recueillis par  Jean Blaise  ESSOMBA et ROLLAND  TAPOLLO